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Vague pendjabie : Ikky, le pont entre les cultures

Le producteur originaire de Brampton veut aider les artistes canado-pendjabis à rayonner sur la scène mondiale, et ce, plus que jamais.

Ikky

Ikky

Équipe photographique : Ishmil Waterman, Lane Dorsey, Sasha Jairam/Billboard Canada. Stylisme par Veronika Lipatova, Nikita Jaisinghani, Aliecia Brisette. Maquillage et coiffure par Franceline Graham.

Ikky dit faire office de pont entre les artistes pendjabis et canadiens. En tant que producteur et directeur créatif de la nouvelle maison de disques 91 North Records, une collaboration entre Warner Music Canada et Warner Music India, il souhaite aider les artistes à connaître le succès à l’échelle mondiale.

Puisqu’il est le seul parmi les artistes de la vague pendjabie figurant en une de Billboard Canada à être né au Canada, il estime occuper une position unique pour unir influences occidentales et tradition pendjabie. Ayant grandi à Rexdale et à Brampton, dans la région du Grand Toronto, le jeune homme de 22 ans affirme que le fait de varier les influences culturelles lui vient tout naturellement.


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« Je suis dans une posture qui me permet de soutenir la communauté autrement, dit-il. Je peux prendre une personne qui est une vedette dans une communauté [en particulier] et la propulser aux côtés des plus grands artistes du monde. »

Making Memories , son album créé en collaboration avec Karan Aujla, explique-t-il, fusionne délibérément des sons pendjabis et occidentaux. Il a visé parfaitement juste puisque l’opus s’est classé au 5e rang du palmarès Billboard des albums canadiens. Les collaborateurs sont sur le point de partir en tournée aux quatre coins des États-Unis. Pourtant, Ikky se tourne déjà vers l’avenir, pour preuve la chanson Iishq Hua (Love Happened), qu’il vient de faire paraître. Elle témoigne d’une nouvelle direction pour l’artiste : « l’ère house ». Plus étonnant encore, il s’agit de son premier morceau qui ne soit pas en pendjabi, mais bien en hindi, langue qu’il n’a pas apprise en grandissant.

Cette sortie coïncide avec une période de tension politique latente après que le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a déclaré que l’Inde pourrait être impliquée dans l’assassinat du militant sikh et citoyen canadien Hardeep Singh Nijjar. Peu de temps après, l’artiste canado-pendjabi Shubh, avec qui Ikky a collaboré dans le passé, a vu sa tournée en Inde annulée après que certains eurent perçu une image qu’il a diffusée sur les réseaux sociaux comme étant une déclaration politique controversée. Ikky affirme qu’il s’agit là d’une question de liberté d’expression et non de politique, et a manifesté son soutien à Shubh.

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« Je fais de la musique par passion, explique Ikky. Mais parce qu’en tant qu’artistes, on a une tribune, on nous entraîne dans une posture politique. »

Néanmoins, selon Ikky, la surveillance dont d’autres artistes pendjabis et lui ont l’impression de faire l’objet ne freine en rien l’élan de leur mouvement musical. Au contraire, elle prouve que leur visibilité prend de l’ampleur. Et renforce leur désir de rester soudés.

« [En voulant rendre la musique pendjabie populaire à l’échelle mondiale, le but] n’a jamais été de seulement l’étendre au Canada et aux États-Unis, explique-t-il. Non, c’est aussi de l’étendre au-delà du Pendjab, vers Delhi, vers Mumbai [Bombay]. Même si on parle différentes langues, même si on appartient à différentes castes, on reste frères et sœurs. »

Alors quand Ikky dit faire office de pont, il le croit réellement.

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Commençons par un aperçu de ton éducation. Comment es-tu arrivé à la musique?

Mon père écrivait en Inde. C’était sa passion. Lorsque [mes parents] ont émigré au Canada, il a dû gagner sa vie ici. Alors, arrivé au Canada avec 25 cents dans les poches, il a commencé à travailler en usine et, quand il nous a eus, mon frère et moi, il nous a fait découvrir la musique. Je jouais des instruments classiques. Mon préféré, c’était le sarangi, un instrument à cordes. Même si je n’utilise pas ces sons traditionnels dans la musique que je crée aujourd’hui, on a quand même l’impression de les entendre quelque part. C’est juste la sensation de ce son. Si on connaît le pendjabi, on peut s’y identifier, mais sans mettre exactement le doigt dessus.

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Sur Instagram, tu as publié des vidéos de certains de tes collaborateurs de Making Memories. Ils parlent de ce qu’ils ont appris en créant de la musique pendjabie, même s’ils ne sont pas eux-mêmes pendjabis. As-tu l’impression d’avoir comblé cet écart?

On a fait pas mal de chansons ensemble, on a grandi ensemble. On s’échange des albums, on apprend, on répète. Ce que j’ai dit, c’est que même si l’album ne contient pas d’instruments traditionnels, on devrait avoir l’impression que c’est le cas. [Mes collaborateurs] m’apprennent tellement de choses sur la musique occidentale. Après, je vais voir Karan et lui dis : « Comment est-ce qu’on peut modifier les mélodies sans éliminer l’essence du pendjabi? »

Quels disques vous êtes-vous échangés?

Côté Penjabi, je suis un très grand fan de Jazzy B et de Sukshinder Shinda. Je jouais donc beaucoup de Roméo de Jazzy B. Et puis, beaucoup d'albums de Drake. Quelque part là-dedans se trouvait Wayne Wonder. Attendez, je peux en fait ouvrir le truc Spotify - nous avions une playlist. « No Role Models » de J. Cole, « Shook Ones » de Mobb Deep, « PIMP| par 50 Cent, DJ Khaled « Staying Alive ». The Weeknd était une grande partie du disque. "A Lonely Night" de Starboy , qui a inspiré "Softly". Il y avait « Movie Star » de Wayne Wonder, « Give Me More » de Keshia Cole, Aliyah, Ashanti. Il y a tellement d'inspirations.

Doucement (vidéo lyrique) Karan Aujla | Ikky | Créer des souvenirs | Dernières chansons punjabi 2023

Tu mentionnes Drake et The Weeknd. Puisque tu as grandi dans la région du Grand Toronto, à Rexdale et à Brampton, est-ce que Toronto a eu une influence sur l’album?

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Je pense que Toronto a une énorme influence sur ce que j’essaie de faire. Il y a quelque chose ici qui fait que, peu importe qu’on fasse de la pop, du hip-hop ou autre chose, tout d’un coup, on fait aussi de la musique pendjabie, parce qu’il y a 20 ans, on avait un ami pendjabi. Les gens autour de moi [à Rexdale] étaient soit antillais, soit pendjabis, alors j’oscillais entre les deux cultures. Notre diversité est tellement énorme à Toronto qu’on peut intégrer ces cultures à sa musique sans même s’en rendre compte.

Ta musique cumule des millions d’écoutes, figure dans les palmarès Billboard. Making Memories s’est classé au 5e rang au Canada. Mais il semble que la reconnaissance vienne davantage de l’Inde que du Canada. Aimerais-tu être reconnu davantage en tant qu’artiste canadien?

Je ne suis pas né en Inde, je suis né au Canada, alors c’est un peu chiant [it kind of sucks] de ne pas être comparé aux producteurs canadiens. Mais maintenant, on passe à l’échelon supérieur, on rivalise à l’échelle nationale. Pour moi, c’est gigantesque. On a dû se battre pour atteindre la 1re place en Inde d’abord, puis atteindre la 5e ici. Mais ça change. Chaque fois qu’on sort un album, il se hisse plus haut dans les palmarès. Je me souviens de petites choses, comme cette fois, il y a cinq ans, où j’ai rencontré les gens de Spotify sur Zoom ; ils ne faisaient rien avec la musique pendjabie, et j’essayais de leur dire que c’est bon. Puis, avance rapide dans le temps jusqu’à aujourd’hui, Warner Canada et Warner India s’unissent. Il y a une stratégie mondiale visant à faire exploser la musique pendjabie.

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Tu es le directeur artistique de 91 North Records. Avec votre propre label, 4N Records, vous avez parlé de la nécessité pour les artistes pendjabi de comprendre des choses comme les redevances et le streaming. En plus de rapprocher les deux côtés culturellement, pensez-vous que cela doit également se produire au niveau de l’industrie ?

C'est juste un système défectueux en Inde. Vous êtes payé une fois et puis boum, ces labels entrent et gagnent tout l’argent. Cette avancée est agréable, mais nous avons généré tellement de flux et de vues [pour les chansons] que nous n'avons jamais vu un centime au-delà. Si nous voulons aller plus loin, nous devrons construire ces fondations. Nous voulons nous mondialiser. Et si vous voulez faire ça, vous ne pouvez pas le faire uniquement avec la musique. Vous avez besoin du marketing. Vous avez besoin de stratégie. Parfois, il faut la force de ces grandes maisons de disques.

As-tu déjà ressenti un choc culturel en travaillant avec des gens de l’industrie canadienne?

Ce qui est bien, c’est que personne de ces étiquettes n’interfère avec la musique, parce que c’est nous qui détenons la connaissance de la musique pendjabie et de la langue. Préserver l’essence du pendjabi, c’est ça surtout qui a changé la donne. Il y a un album entièrement en pendjabi, mais en plus, une maison de disques au Canada le fait mousser. C’est du jamais-vu.

Tu as dit que c’était l’avenir de la musique. Que voulais-tu dire?

On est en train de bâtir un socle sur lequel les jeunes de la prochaine génération pourront s’appuyer durant les 10 prochaines années jusqu’à ce qu’ils deviennent eux-mêmes producteurs, eux-mêmes artistes. Je pense qu’on a réussi à donner naissance à une toute nouvelle culture. Ce n’est plus une expérience. On voit à quel point ça sonne bien quand tous ces univers entrent en collision. Aujourd’hui, on en repousse les limites.

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