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La musique et l'activisme des Pussy Riot à l'honneur à Montréal

Le collectif punk rock féministe a entamé à Montréal une série de concerts en Amérique du Nord basée sur l’ouvrage de l’une de ses membres, Maria Alekhina, en plus de présenter une exposition au Musée d'art contemporain de la ville.

Les Pussy Riot pendant leur concert du 1er novembre 2023 à Montréal

Les Pussy Riot pendant leur concert du 1er novembre 2023 à Montréal

Sarah ODriscoll

Les actions et les protestations des Pussy Riot durent depuis plus d’une décennie et leur message dépasse largement les frontières de la Russie. Loin de leur mère patrie et loin de la censure de Poutine, le collectif fait aujourd'hui entendre sa voix au Canada et aux États-Unis, qui se font l'écho de leur discours.

Nous sommes en novembre et alors qu’un froid lugubre envahit les rues de Montréal, les Pussy Riot donnent au Théâtre Rialto le coup d’envoi de la partie nord-américaine de leur tournée Riot Days. Le spectacle - un concert qui prend des airs de performance théâtrale et multimédia - affiche complet et la tension est palpable. La violoniste Alina Petrova offre d'abord un intrigant solo expérimental. Elle est rejointe quelques minutes plus tard par Maria «Masha» Alekhina, Diana Burkot et Olga Borisova, qui font une arrivée triomphale sur scène. La communion entre les Pussy Riot et leur audience est, de fait, instantanée.


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«But what about the revolution» [Mais qu’en est-il de la révolution, NDLR], peut-on lire sur l’écran géant derrière elles.

«Riot Days n’est pas un concert comme les autres, c’est une histoire que nous racontons», confie Masha en entrevue avec Billboard Canada.

Dans le Rialto, les Pussy Riot font retentir des hymnes définitivement punk ancrés dans des sonorités électroniques exécutées par les musiciennes Alina Petrova et Diana Burkot, tandis que Masha et Olga Borisova s'emparent des micros pour déclamer leurs poèmes de résistance.

Si, de son côté, elle ne se considère nullement musicienne, Masha prend à bras le corps la responsabilité d’ouvrir les yeux du public grâce à l’art et à son statut d’icône du militantisme. «Avec les Pussy Riot, nous utilisons la musique pour faire passer notre message, dit-elle. C’est très clair».

Lors d'une séquence désormais célèbre, Masha, avec ses consœurs Nadejda Tolokonnikova et Ekaterina Samoutsevitch, fut ainsi arrêtée et incarcérée à la suite de la «Punk Prayer» du 21 février 2012 dans la cathédrale du Christ-Sauveur de Moscou.

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Pussy Riot's 'punk prayer'www.youtube.com

Justement, le récit de Riot Days s’amorce sur les planches du théâtre par l’évocation de cette «prière» anti-Poutine, qui leur a par ailleurs permis d’accéder à une notoriété mondiale. «Chaque chanson sur scène est basée sur mon livre, "Jours d'insurrection" - de la première action des Pussy Riot à laquelle j’ai participé aux derniers jours que j’ai passés en prison après une condamnation de deux ans», explique Masha.

«C’est important pour moi de revenir ouvertement sur tous des événements, parce que c’est comme ça que la répression a commencé à progresser en Russie», souligne l’artiste qui documente également l’expositionTerrorisme de velours: la Russie des Pussy Riot, présentée en première nord-américaine au Musée d'art contemporain de Montréal (MAC) jusqu’en mars 2024. Celle-ci retrace dans un ordre chronologique et dans une cacophonie néanmoins nécessaire les nombreuses actions des Pussy Riot au rythme d'archives vidéos, de photos et de textes. Plus le collectif se fait entendre, plus les autorités deviennent violentes. «Notre pays est passé d’un état autoritaire à un état terroriste avec l’invasion à grande échelle de l’Ukraine en 2022», relève-t-elle.

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Selon Masha, peu de gens comprennent ce que cela signifierait pour le monde si l’Ukraine perdait la guerre. Face à une menace qu’elles croient imminente, les Pussy Riot se sont promis d'alerter sans relâche à un niveau international. «Si les gens arrêtent de se battre pour leurs droits, les démocraties vont s’effondrer», prévient Masha qui a beaucoup de choses à dire.

«Le régime de Poutine finance les mouvements d’extrême droite depuis longtemps, ce n’est pas nouveau. Mais on commence à en voir les résultats maintenant, un peu partout dans le monde. Même ici, je vois que des gens sont conditionnés par la propagande», indique Masha en référence aux politiques antiavortement et anti-LGBTQ+ qui pullulent en Occident. Pour elle, il est primordial que tout un chacun connaisse le sort réservé, affirme-t-elle, aux opposants à Poutine en Russie: «Les années d'emprisonnement, les empoisonnements, les meurtres… Tout ça est dans l’exposition». Dans Riot Days aussi.

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Masha redoute également la prochaine élection présidentielle américaine qui aura lieu en 2024 et la potentielle réélection de Donald Trump, que Poutine a récemment encensé.

Quant au Canada, où les Pussy Riot se sont donc produites mercredi à Montréal et jeudi à Toronto dans le cadre de Riot Days, Masha veut rester positive. «Une de mes amies est militante des droits de la personne et elle travaille à l’évacuation des personnes LGBTQ+ de la Tchétchénie et d'après elle, le Canada est le premier pays qui accueille les Tchétchènes membres de la communauté gaie qui se font torturer et tuer chez eux», fait-elle remarquer.

Depuis que ce scandale a éclaté en 2017, le gouvernement de Justin Trudeau a, en effet, poursuivi des efforts pour faire évacuer ces réfugiés politiques de la petite République russe du Caucase. Rappelons à ce propos que la Russie multiplie les lois anti-LGBTQ+ depuis une dizaine d’années et qu’en juillet 2023 les personnes transgenres se sont vu interdire leur transition médicale, le mariage et l’adoption d’enfants.

Vu le contexte géopolitique actuel, Masha ne veut cependant pas que l’enjeu de la souffrance ukrainienne soit oublié. Après Riot Days et Terrorisme de velours: la Russie des Pussy Riot, son souhait le plus cher est que les gens gardent en tête le message de son collectif. «Nous devons continuer de nous battre, sans cesse», somme-t-elle.

Bien qu’elles aient passé plusieurs années en centre de détention, en assignation à domicile ou dans des camps de travail, les goulags, et qu’elles figurent sur la liste des personnes recherchées par la Russie, Masha et les Pussy Riot persévèrent et rapportent leur combat jusqu'au Canada et aux États-Unis.

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«J’ai fait ce choix de quitter mon pays pour pouvoir aider l’Ukraine, car c’est impossible de le faire depuis la Russie en ce moment», conclut Masha.

Terrorisme de velours : la Russie des Pussy Riot est présenté à Montréal jusqu'au 10 mars 2024.

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