À Osheaga, Doechii s’impose avec une prestation sensationnelle et pleine d’assurance
Pour sa toute première prestation au Canada, Doechii a déployé tout son charisme scénique : entre démonstration de talent brut, prise de position en faveur de la Palestine et performance à la hauteur d’une tête d’affiche, la rappeuse a marqué les esprits. Seule ombre au tableau : le couvre-feu strict d’Osheaga, qui l’a contrainte à couper court à 23 h.

Doechii se produit à Osheaga 2025 à Montréal.
Osheaga a décidément le chic pour flairer les futures superstars. Après Chappell Roan l’an dernier, c’est Doechii qui a marqué les esprits cette année.
Originaire de Floride et récemment récompensée aux Grammy, la rappeuse a offert un concert saisissant vendredi 1er août, lors de la soirée d’ouverture du festival montréalais. Si The Killers occupaient la scène principale, Doechii a eu l’honneur de clôturer la soirée sur la scène Forest – une place de choix, là où Chappell Roan avait joué à 15 h 30 l’an dernier devant 40 000 personnes.
Son concert, légèrement repoussé à 22h10, faisait d’elle la dernière artiste à performer avant le couvre-feu de 23 h. Les festivaliers avides de tout voir ont pu en profiter pleinement : The Killers, en bons joueurs, ont ouvert leur set dès 21 h 10 avec « Mr. Brightside » et une avalanche de tubes dans la première heure.
Côté mise en scène, Doechii a planté le décor de son univers singulier de Princesse des Marais : verdure luxuriante, estrade surélevée, atmosphère étrange et envoûtante. Devant une foule compacte mais concentrée, l’artiste a brillé par son aisance scénique. « J’ai bonne mine grâce aux saignements de nez », lançait-elle dans « Nosebleeds », son tube de 2025 — et ce soir-là, elle en avait effectivement l’allure.
Doechii se produit à Osheaga 2025 à Montréal. Charlotte Rainville @jailli
Pendant une heure entière, Doechii a tenu la scène avec une intensité inébranlable. Elle a rappé à vive allure, sans filet, livrant une performance vocale quasi sans accompagnement, démontrant une maîtrise impressionnante. Son set naviguait avec aisance entre hip-hop pur, refrains R&B accrocheurs, punchlines hilarantes et moments chorégraphiés millimétrés. Charismatique et libre, elle dansait, twerkait, enchaînait les poses stylées comme pour rappeler qu’elle n’était pas seulement rappeuse, mais véritable performeuse.
Célébrant ses racines musicales, elle a rendu hommage au hip-hop classique en rappant sur le mythique « C.R.E.A.M. » du Wu-Tang Clan, avant de basculer dans un univers plus abrasif, criant sur une boucle de guitare saturée flirtant avec le nu metal. Une démonstration de versatilité totale : Doechii peut tout faire, et elle le sait.
Face à elle, un public captivé, énergique, connaissant les paroles et les renvoyant avec ferveur. C’était sa toute première venue au Canada, et l’artiste n’a pas caché son émotion. « En tant qu’artiste, on est parfois submergé par la haine et la négativité. Et puis, on sort dans le monde réel, et on tombe sur ses vrais fans », a-t-elle confié, visiblement touchée.
Elle a pris soin de remercier ses fans gays, ses fans féminines et « celles venues avec leurs petits amis », lâchant au passage : « Si ton mec déteste les rappeuses, quitte-le tout de suite. »
Puis, voyant les téléphones braqués sur elle, elle a saisi l’instant pour prendre position : « N’ayez pas peur de défendre vos convictions. N’ayez pas peur de dire ce qui compte. » Avant de conclure, le poing levé : « Libérez la Palestine. »
Doechii se produit à Osheaga 2025 à Montréal. Charlotte Rainville @jailli
Doechii a offert à la foule son plus grand succès à ce jour, « Anxiety », classé dans le top 10 du Billboard Hot 100. Porté par un sample inattendu de « Somebody That I Used To Know » de Gotye, le morceau détonne dans son répertoire plus brut — mais est devenu un favori viral sur TikTok. Intégré avec habileté à son set, il a suscité un moment de liesse collective. Après la chanson, elle a pris un instant pour remercier Gotye pour son approbation publique.
Mais c’est avec « Denial Is A River » que le concert a atteint son sommet émotionnel. Se livrant dans un monologue intérieur déchirant, Doechii a vu sa vulnérabilité amplifiée par le chœur du public, qui reprenait chaque mot avec ferveur.
Alors qu’elle enchaînait avec un autre titre, le beat s’est soudainement interrompu. « Putain, ils m’ont coupée ! » a-t-elle lancé, visiblement frustrée, en baissant les pouces — ce qui a déclenché les huées du public. Elle a ensuite levé les mains, résignée : « Peu importe », a-t-elle lâché avant de quitter la scène.
Le couvre-feu rigide d’Osheaga, fixé à 23 h, ne lui a pas permis de conclure son set comme elle l’aurait souhaité. Une chose est sûre : à son prochain passage, Doechii méritera un créneau en tête d’affiche, avec un show à la hauteur de son ambition.
La rappeuse enchaîne dès ce soir (2 août) au Lollapalooza de Chicago, où elle a promis un invité surprise. Si Osheaga est un bon indicateur, ce concert devrait faire le tour des réseaux sociaux dans les prochaines heures.